Je sais

« Je sais », titre de l’album Menteur. Des paroles magnifiques et la douce voix de Cali qui chante la détresse.  Nous pouvons penser que Cali  interprète la mort de sa mère lorsqu’il avait 6 ans. Il répète « Je sais  » mais nous comprenons qu’ en fait il ne sait pas…. On ressent la descente aux enfers progressives, le chagrin, la souffrance, l’impuissance. L’accompagnement remarquable et monotone  au piano accentue la douleur.  Dans son roman « seuls les enfants savent aimer » nous retrouvons des phrases qui font ressentir ce sentiment d’incompréhension : « Mireille,  je sais que c’est toi maman, mais « décédée » ça veut dire quoi ? » p. 20, « Mais tout ça, c’est normal maman, c’était à cause de ta maladie. » P. 16,  » En moi il n’y avait qu’un mot : pourquoi?  » P. 78
Cali
Cali

Je sais son regard blanc sur son lit mortuaire
Et l’épée de poison qui transperça mon père
Je sais les dos voûtés sous les tristes nouvelles
Et je sais les bruits sourds je sais les coups de pelle
Je sais les voix fanées qui s’habillent d’excuses
Et celles trop huilées emmaillotées de ruses
Je sais les longues nuits à courtiser la mort
Pendu aux mots blanchis à la chaux du remord

Mais ne me demande pas
Pourquoi elle s’en va
Je ne sais pas

Je sais tous les amis qui se troquent des rêves
Aux bras de mots jaunis au goulot où l’on crève
Je sais toutes ces heures enfilées en collier
Qui oeuvrent pour la mort sans vraiment s’en douter
Et je sais que la pluie ne lave rien du tout
Qu’elle aide juste notre ennui à tenir jusqu’au bout
Je sais ces heures lentes qui gravissent la nuit
Et la lune élégante qui de travers sourit

Mais ne me demande pas
Pourquoi elle s’en va
Je ne sais pas

Je sais qu’il manquera toujours quelqu’un en bout de table
Et je sais oh combien tu étais désirable
Je sais la solitude et ce goût de sang dans la bouche
La misérable habitude de finir seul dans sa couche
Je sais les tours joués par le goût de l’impossible
Je sais l’amour qui meurt dans des souffrances horribles
Je sais qu’à trop se retourner on tourne le dos au bonheur
Le reflet du visage déformé dans un lac de douleur

Je sais les pieds gonflés à courir après un salaire
Je sais les coeurs rouillés qui ne partiront plus en guerre
Je sais les doigts transis qui ne serrent plus en poing
Et je connais l’amour terroriste poseur de bombes ou de lapins
Je sais ces grises épaves qui bavent sur la vie
Et leur sourire grave vissé par le mépris
Je sais ces nuits rassises où le sommeil nous laisse
Seuls avec nos pires ennemis et criblés de détresse

Mais ne me demande pas
Pourquoi elle s’en va
Je ne sais pas
Je ne sais pas

L’âge d’or

« L’âge d’or » clôture le 6 ème album de Cali. Ce titre emprunté à Léo Ferré, est une chanson d’utopie pleine d’espérance composée pendant l’été 1959. Il apparaît sur l’album « 1913-19… » . L’âge d’or c’est une façon d’exprimer que le meilleur reste à venir, c’est une rare chanson lumineuse et optimiste de Léo. En 2008, Cali sortait déjà un album intitulé « l’Espoir » en hommage à l’auteur compositeur. Pour lui c’est le Beethoven du XX ème siècle…

 

L'âge d'or Cali
L’âge d’or Cali

Nous aurons du pain,                Nous aurons des lits
Doré comme les filles                Creusés comme des filles
Sous les soleils d’or.                   Dans le sable fin.
Nous aurons du vin,                   Nous aurons des fruits
De celui qui pétille                      Les mêmes qu’on grappille
Même quand il dort.                   Dans le champ voisin.
Nous aurons du sang                  Nous aurons, bien sûr,
Dedans nos veines blanches    Dedans nos maisons blêmes,
Et, le plus souvent,                      Tous les becs d’azur
Lundi sera dimanche.                 Qui là haut se promènent.
Mais note âge alors                      Mais notre âge alors,
Sera l’âge d’or.                               Sera l’âge d’or.

 

Léo Ferré 1916-19...
Léo Ferré 1916-19…

                               Nous aurons la mer
                               À deux pas de l’étoile.
                               Les jours de grand vent,
                               Nous aurons l’hiver
                               Avec une cigale
                               Dans ses cheveux blancs.
                               Nous aurons l’amour
                               Dedans tous nos problèmes
                               Et tous les discours
                               Finiront par « je t’aime »
                               Vienne, vienne alors,
                               Vienne l’âge d’or.

Annie Girardot

« Annie Girardot », septième chanson de l’album « les Choses défendues » de Cali (2016). Le sujet de cette chanson n’est pas l’actrice Annie Giradot. Cali raconte le jour de l’enterrement de sa mère. Il se souvient du regard de son père qu’il compare avec celui d’Annie Girardot dans le film de Claude Lelouch « un homme qui me plaît ». L’actrice attend son amant ( Jean-Paul Belmondo) dans un Aéroport. Celui-ci n’arrivera jamais… « Je ne vais pas mourir tout de suite ou bien je vais mourir jusqu’au bout » : cette phrase, souvent prononcée par son père, raisonne dans la tête du chanteur. Nous retrouvons  ces mots dans le roman de Cali « Seuls les enfants savent aimer » : « Je ne vais pas mourir tout de suite mais je vais mourir jusqu’au bout. Depuis que papa a prononcé cette phrase devant votre lit, je la vois ricocher contre les murs, tous les murs »

Julien Lebart, Alain Verderosa, Cali
Julien Lebart, Alain Verderosa, Cali
Nous étions tous allongés
Les quatre enfants autour de leur père
Les volets étaient tirés
Seules quelques larmes de jour osèrent
Se glisser dans la chambre froide et triste
C’était deux jours après
C’était un 5 janvier
Nous étions tous les cinq allongés

Mon père nous rassembla
Avec ses deux bras très forts
Il ne parlait pas perdu comme
Annie Girardot à l’aéroport
Nous pleurions tous les cinq
Enlacés sur leur lit
Un fagot de chagrin
Jeté sur leur grand lit
Il venait d’enterrer sa femme
En début d’après-midi

Je ne me souviens pas des quelques mots
Qui ont réussi à sortir de sa barbe
C’était peut-être de jolis mots
Je ne me souviens que de sa barbe
Je ne vais pas mourir tout de suite
Ou bien je vais mourir jusqu’au bout
Je ne me souviens plus de ses mots
Ni de grand-chose
Moi, j’étais glissé en dessous

Nous pleurions tous les cinq
Enlacés sur leur lit
Un fagot de chagrin
Jeté sur leur grand lit
Il venait d’enterrer sa femme
En début d’après-midi
On ne se rappelle pas de tout
Mais jamais on n’oublie

La Lettre

« La Lettre » est  une chanson cachée de l’album « menteur » et extraite du single « je m’en vais »  sortie en 2005. C’est une lettre de rupture avec un accompagnement musical joué au piano. Une musique  très enfantine qui rappelle une comptine. On y retrouve les thèmes de la rupture amoureuse, du temps qui passe, la déception, l’abandon, la mort. Le tout avec une pointe d’humour et de douceur. Cali rend  hommage à Richard Brautigan  écrivain et poète américain.

La Lettre Cali

Ça ressemble à une lettre d’adieu
Non elle n’est plus si sûre
Elle me trouve un peu trop vieux
Et pourtant pas assez mûr

Vers la fin elle dit qu’elle m’a aimé
Souvent 
surtout quand j’étais absent
Je lui manquais jusqu’à mon retour
Est-ce que c’est ça le vrai amour

Il y a des mots qui vous ligotent les mains et les pieds
Et qui vous jettent au fond d’un gouffre avec un boulet
Il y a des mots qui vous rappellent qu’on n’a pas voulu tout ça
il y a des mots qui vous écrasent des mégots brûlants sur le bras

Elle me dit qu’on a peut-être fait le tour
Qu’on a vraiment tout essayé
Elle m’écrit que notre amour
A les lacets défaits

C’est la première lettre sans son coeur
D’habitude il s’accroche à chaque mot
Je ne connaissais d’elle que la douceur
Aujourd’hui j’aperçois l’échafaud Lire la suite